HENRI AMOUROUX, dans le quatrième tome de sa Grande histoire des Français sous l’occupation, aborde l’autre versant de cette période qui fut à sa manière le combat d’une nation contre elle-même. Jusque-là le Peuple du désastre, Quarante millions de pétainistes et les Beaux Jours des collabos avaient montré l’accablement d’un pays assommé par la déroute de 1940, ses réactions irraisonnées d’enfant en détresse en quête d’un père miracle et, au terme des deux premières années, les limites d’une politique dite de collaboration avec l’Allemagne nazie qui mêla les passionnés et les cyniques.
Cependant, à contre – courant de ces abandons et de ce consentement, parfois satisfait, à la loi du plus fort, la Résistance naissait dans ses solitudes diverses, se cherchait, face encore cachée de l’histoire. Le Peuple réveillé raconte cet enfantement incertain, complexe, aux aspirations à la fois communes et si différentes.
D’emblée, Henri Amouroux revient et s’attache à Charles de Gaulle, puisque c’est bien lui l’auteur du premier appel, le 18 juin 1940. Bonne occasion de composer et même de recomposer le portrait d’un modèle avec lequel il semble que les historiens n’en finiront jamais. Portrait en pied, mais évidemment daté. En juin 1940, ce n’est pas uniquement un général de brigade à titre temporaire qui débarque à Londres. C’est aussi un sous-secrétaire d’État du cabinet de Paul Reynaud et, du même coup, un membre du gouvernement français qui a refusé l’idée de l’armistice. Ce militaire déjà frotté à la politique n’est pas un inconnu. Ce que l’on sait de lui à cette époque, de ses écrits, de ses pensées, de ses frictions avec les uns ou les autres, est parfaitement annonciateur des propos à venir et dont tout le sens se ramènera à cette réflexion : ” Prenez invariablement la position la plus élevée, c’est généralement la moins encombrée. ” Henri Amouroux pour avoir lu, relu, confronté, aboutit à cette conclusion que l’homme du 18 juin s’embarquait vers son destin…